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La gestion des matières granulaires résiduelles : les déclarations de conformité et les exemptions

Par Me Nicolas Trottier, Daigneault, avocats

L’entrée en vigueur du Règlement encadrant les activités en fonction de leur impact sur l’environnement 1 (ci-après « REAFIE ») et du Règlement concernant la valorisation de matières résiduelles 2 (ci-après « RVMR »), le 31 décembre dernier, marque l’arrivée de nouvelles règles et d’un nouveau régime d’autorisation pour la gestion des matériaux granulaires issus du domaine de la construction et de la démolition. Plus spécifiquement, nous aborderons ici le régime de déclarations de conformité et d’exemptions qui leur est applicable.

Tout d’abord, ces règlements introduisent une nouveauté : la notion de « matières granulaires résiduelles » (ci-après « MGR »). Que veut-on dire par ce terme ? Nous en comprenons qu’il s’agit en fait d’un statut que l’on donne à certains matériaux granulaires : a priori, ces derniers constituent des matières résiduelles, car ils sont issus de travaux de construction ou de démolition, mais lorsqu’ils répondent à certaines normes, ils peuvent être valorisés en tant que MGR. Ces normes sont prévues au RVMR et concernent entre autres la granulométrie, le niveau de contamination et le contenu (incluant les impuretés) des matières  3. Cette notion de MGR et le régime d’autorisation qui l’entoure viennent entre autres remplacer les Lignes directrices relatives à la gestion de béton, de brique et d’asphalte issus des travaux de construction et de démolition et des résidus du secteur de la pierre de taille  4 (ci-après « Lignes directrices »). Peuvent être des MGR, de façon non exhaustive, la brique, le béton, les enrobés bitumineux (asphalte) et, contrairement à ce que prévoyaient les Lignes directrices, la pierre concassée 5.

Ce nouveau régime d’autorisation entourant les MGR fait une distinction entre, d’une part, les activités de valorisation qui précèdent leur utilisation et, de l’autre, leur utilisation en tant que telle, soit le moment où les MGR sont valorisées ou utilisées comme produit dans un procédé ou comme matériaux de construction.

Les activités qui précèdent l’utilisation

Commençons par les activités de valorisation qui précèdent l’utilisation des matériaux, notamment le concassage, le tamisage et le stockage. Le REAFIE prévoit aux articles 259 et 260 que ces activités sont admissibles à une déclaration de conformité, en vue de leur valorisation, en ce qui a trait à la pierre concassée, aux résidus du secteur de la pierre de taille, à la brique, au béton ou aux enrobés bitumineux, et ce, à plusieurs conditions. Ces dernières concernent notamment l’aménagement de l’aire de stockage, les normes pour les eaux usées, le volume maximal de matières pouvant se retrouver sur le site (1 000 m3) et les catégories de matières visées (au sens du RVMR). Les activités visées par ces articles s’apparentent à la production de MGR.

Par ailleurs, l’article 282 du REAFIE prévoit une exemption pour les activités de stockage de matériaux granulaires qui ont le statut de MGR à certaines conditions. Par exemple, on prévoit l’aménagement d’une aire de stockage si le volume accumulé est de plus de 60 m3, alors que le volume total doit en tout temps être inférieur ou égal à 300 m3. Ces activités de stockage peuvent être, par exemple, adjacentes et préalables à l’utilisation des MGR dans un procédé. Il faut noter que l’article 283 du REAFI contient une exemption spécifique concernant le stockage de MGR pour les usines de béton bitumineux et de béton de ciment qui fonctionnent par déclaration de conformité, lesquelles utilisent régulièrement des MGR. 

Afin d’accommoder les chantiers de construction et de démolition, le REAFIE prévoit une exemption à l’article 291 pour le stockage, le concassage et le tamisage de certains matériaux granulaires (brique, béton, enrobé bitumineux et pierre concassée) effectués lors de travaux de construction ou de démolition, à condition que le stockage soit exercé sur le site des travaux et que les matériaux ne contiennent pas d’amiante. Bien que le libellé de cet article ne mentionne nulle part la notion de MGR, on peut supposer que celles-ci pourront être valorisées si elles se qualifient à ce titre.

En sus des conditions prévues au REAFIE, chacune des activités faisant l’objet d’une déclaration de conformité ou d’une exemption doit se conformer aux normes du RVMR concernant la localisation 6 et l’exploitation (bruit, tenue d’un registre)  7.

Le volet utilisation

En ce qui concerne le volet utilisation des MGR, mis à part l’article 178 du REAFIE, qui permet spécifiquement l’utilisation des MGR pour le remblayage des tranchées de conduites d’eau destinée à la consommation humaine, c’est l’article 284 du REAFIE qui s’applique. Celui-ci prévoit que la valorisation de MGR est exemptée d’une autorisation si les conditions qui y sont énumérées sont respectées. Plusieurs de ces conditions concernent l’utilisation des MGR en tant que remblai (épaisseur, compactage, recouvrement, niveau par rapport aux eaux souterraines).

Autrement, les MGR peuvent être utilisées pour les usages permis  8 selon leur catégorie  9. Il s’agit ni plus ni moins d’une mise à jour des Lignes directrices quant aux usages permis et aux quatre catégories de MGR.

Toujours selon l’article 284 du REAFIE, les MGR doivent provenir d’un producteur de matières granulaires légalement en mesure de les produire. L’article 15 du RVMR prévoit une définition de la notion de producteur de MGR : « une personne exploitant une entreprise qui effectue le stockage et le conditionnement de matières résiduelles visées par le présent chapitre ainsi que le stockage, la distribution ou la vente de matières granulaires résiduelles produites à partir de celles-ci ». Ce producteur a d’ailleurs l’obligation d’effectuer une caractérisation des MGR selon la fréquence et les paramètres indiqués aux articles 19 à 25 du RVMR.

Enfin, cette exemption prévue à l’article 284 du REAFIE portant sur l’utilisation des MGR nous mène à la question suivante : doit-on supposer que tout usage de MGR qui ne peut bénéficier de cette exemption doit impérativement faire l’objet d’une autorisation ministérielle en vertu de l’article 22 de la LQE ?

  1. (2020) 152 G.O. II, 3627A.
  2. (2020) 152 G.O. II, 3763A.
  3. RVMR, art. 14 à 18.
  4. Lignes directrices relatives à la gestion de béton, de brique et d’asphalte issus des travaux de construction et de démolition et des résidus du secteur de la pierre de taille. (2009).

http://www.environnement.gouv.qc.ca/matieres/valorisation/lignesdirectrices/beton-brique-asphalte.pdf

  • RVMR, art. 5 et 6.
  • RVMR, art. 8 et 9.
  • RVMR, art. 27.
  • RVMR, art. 26.

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