Si vous suivez l’actualité, vous avez assurément constaté dans les derniers mois que certaines entreprises ont été sanctionnées par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) pour avoir enfreint les règles environnementales. Si vous êtes dans l’industrie, vous savez que, malheureusement, cela n’est que la pointe de l’iceberg.
Lorsque je parle d’infractions aux règles environnementales, je ne parle pas des entreprises qui ont omis de déposer un rapport dans les délais prescrits. Je parle plutôt de celles pour qui les règles environnementales ne sont qu’un jeu. Un jeu qui s’incarne par la disposition de matières dans des lieux non autorisés, qui contamine les terres agricoles et les cours d’eau, ou encore par le stockage excessif de matières résiduelles sur un terrain, allant jusqu’à mettre la sécurité du voisinage en péril. C’est d’elles que je parle. Il s’agit d’une dizaine d’entreprises dans différents secteurs d’activité (les CRD, les boues municipales, les matières dangereuses et les sols contaminés) qui font mal paraître l’ensemble de ces secteurs et, surtout, qui entrent en concurrence déloyale avec les entreprises membres du CETEQ qui œuvrent avec le plus haut standard de qualité dans ces secteurs.
Pourquoi en sommes-nous là ?
Au cours des dernières années, plusieurs modifications législatives et réglementaires ont permis au MELCCFP de se doter de nouveaux pouvoirs et technologies pour mieux faire appliquer les règles environnementales. Toutefois, ce que l’on constate sur le terrain, c’est que les principales entreprises délinquantes fonctionnent toujours au vu et au su de l’industrie, malgré plusieurs récriminations.
Les inspections et les enquêtes du MELCCFP sont un début de réponse à cette situation, parce que les délais sont longs et que les maigres pénalités qui s’appliquent aux entreprises reconnues coupables ne sont pas dissuasives. Comment pouvons-nous faire rentrer dans le rang des entreprises qui engrangent des millions de dollars grâce à des stratagèmes ? Certainement pas avec des pénalités symboliques.
Quelles sont les solutions en amont ?
Les entreprises délinquantes font preuve de créativité pour contourner le système, alors il faut être plus intelligents qu’elles. Et c’est ensemble que nous y arriverons. Il faut d’abord que les principales parties prenantes, soit le MELCCFP, le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation (MAMH), le ministère de la Justice, le ministère des Transports, le Conseil du trésor, l’Autorité des marchés publics, les villes et le CETEQ s’assoient à la même table pour faire l’état des lieux. Une fois les limites et les lacunes du système actuel identifiées, il sera plus facile de concentrer nos efforts collectifs sur les mesures les plus structurantes, qui auront des répercussions positives sur l’environnement et qui réduiront la possibilité qu’une entreprise passe entre les mailles du filet.
Un premier tour de roue permet déjà de nommer certaines mesures à considérer pour chacune des parties prenantes.
• Le MELCCFP : accélérer le traitement des enquêtes, appliquer des pénalités plus dissuasives et repenser le contrôle afin de pouvoir mieux bâtir la preuve ;
• Le MAMH et les villes : s’assurer que les donneurs d’ordre municipaux ont les pouvoirs, les outils et les connaissances pour exclure des appels d’offres publics les entreprises délinquantes. Après tout, le meilleur contrôle environnemental, c’est celui qui n’a pas besoin d’être fait ;
• L’Autorité des marchés publics : élargir son mandat afin qu’elle puisse analyser plus d’appels d’offres publics et par conséquent, qu’elle puisse bannir de ceux-ci un plus grand nombre d’entreprises délinquantes ;
• Le ministère de la Justice et le Conseil du Trésor : s’assurer d’offrir au MELCCFP les conditions gagnantes et les ressources nécessaires pour mener à terme les enquêtes.
« En l’absence de grandes améliorations, le contrôle environnemental continuera à niveler par le bas en défavorisant les entrepreneurs qui visent haut en matière de normes de qualité. »
On dit que la force d’une chaîne dépend de son maillon le plus faible. Dans le cas présent, je dirais que le maillon qui a le plus besoin d’être solidifié est celui du contrôle environnemental au sens large. Aucun changement législatif ou réglementaire n’aura les effets escomptés si les règles ne sont pas appliquées sur le terrain. En l’absence de grandes améliorations, le contrôle environnemental continuera à niveler par le bas en défavorisant les entrepreneurs qui visent haut en matière de normes de qualité. Il est temps que le gouvernement du Québec mette la main à la pâte afin d’empêcher, dans notre cour, des comportements illégaux qui mettent à mal la planète pour la protection de laquelle nous investissons tous temps et argent.