Annuellement, les chantiers de construction, de rénovation et de démolition (CRD) génèrent environ 3,5 millions de tonnes de résidus. Selon les plus récentes données de RECYC-QUÉBEC, c’est un peu plus de 50 % des résidus de CRD du secteur du bâtiment qui transitent par des centres de tri spécialisés1. Suivant les directives énoncées par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs à travers sa Stratégie de valorisation de la matière organique, RECYC-QUÉBEC continue toutefois ses efforts pour augmenter la quantité de résidus de CRD acheminés à ces centres de tri, en plus d’en améliorer la performance. À cet effet, un comité sous la coordination de l’organisation a proposé une liste d’actions prioritaires à mettre en place au cours des deux prochaines années. Cette liste constitue le Plan d’action 2024-20262, que nous résumerons dans le présent texte en faisant ressortir certains éléments juridiques d’intérêt.
Études et analyses
Le premier objectif du Plan d’action 2024-2026 se divise en quatre actions. Celles-ci visent à colliger et à analyser des données sur les résidus de CRD et sur leur chaîne de valeur, dans l’objectif d’identifier d’autres mesures concrètes à mettre de l’avant.
On propose ainsi de réaliser, en 2025, diverses études pour évaluer les répercussions et la faisabilité de nouveaux modes de gestion des résidus de CRD sur les chantiers. On étudierait également les coûts, l’efficacité de détournement de l’enfouissement et les émissions de gaz à effet de serre évitées, le tout pour permettre aux donneurs d’ouvrage d’avoir des données concrètes avant leur prise de décision. Le plan d’action prévoit également l’élaboration d’une cartographie et d’une liste des installations autorisées à traiter les résidus de CRD. Cette cartographie et cette liste ont été développées à l’été 2024 et sont donc déjà disponibles pour consultation sur le site Internet de RECYC-QUÉBEC3.
Une dernière action est proposée dans le premier objectif du Plan d’action 2024-2026, soit l’évaluation des différentes options qui permettraient d’augmenter les quantités de résidus de CRD valorisées. À ce sujet, autant des incitatifs financiers que des modifications réglementaires et l’ouverture des écocentres aux entrepreneurs seraient considérés. L’une de ces options réglementaires étudiées est l’application d’une pénalité ou d’une redevance pour l’élimination de résidus de CRD qui n’auraient pas préalablement été acheminés à un centre de tri de CRD. Étant donné les implications juridiques et l’analyse globale que sous-tend cette action, il est prévu que le résultat de ces évaluations ne soit disponible qu’à l’hiver 2026.
Modifications contractuelles
Le deuxième objectif du Plan d’action 2024-2026 prévoit deux actions qui impliquent des modifications dans les pratiques contractuelles visant à encourager les efforts de détournement des résidus de CRD de l’enfouissement et les pratiques de valorisation de ces résidus.
Le plan d’action suggère ainsi de créer et d’intégrer de nouvelles clauses standards dans les devis d’appels d’offres publics. Par exemple, ces clauses pourraient exposer les efforts minimaux devant être mis en place par les soumissionnaires pour permettre un meilleur tri des résidus de CRD. Elles pourraient en outre imposer l’accomplissement de travaux de déconstruction plutôt que de démolition ou des pourcentages minimums de matières résiduelles acheminées à des centres de tri de CRD. Dans le même objectif, le Plan d’action 2024-2026 propose également que les permis de construction délivrés par les municipalités et villes puissent inclure des clauses standards similaires. Le champ d’application de cette action vise donc non seulement les travaux liés aux contrats publics, mais aussi les travaux de construction résidentielle, commerciale ou industrielle, ce qui permet de couvrir un large éventail de travaux.
À notre avis, il s’agit là d’une manière juridique efficace d’encourager un plus grand nombre d’entrepreneurs à développer de meilleures pratiques de gestion des résidus de CRD, en rendant certaines pratiques tellement communes qu’elles en seraient incontournables.
Développements d’outils
Le dernier objectif du Plan d’action 2024-2026 est d’offrir des outils aux acteurs concernés par la gestion des résidus de CRD afin de les encourager et de les aider dans la mise en place d’actions concrètes.
Ainsi, en 2024, des échanges ont eu lieu avec les gestionnaires de centres de tri de CRD pour leur permettre d’améliorer la précision des rapports qu’ils produisent, le tout afin d’obtenir des données plus exactes sur la valorisation des résidus de CRD. Le plan d’action suggère également, d’ici la fin de l’année 2024, de mettre en place un programme d’aide financière réservé aux acteurs de la gestion des résidus de CRD. Finalement, pour l’année 2026, des outils de sensibilisation et des formations pour les entrepreneurs et les concepteurs de projet seraient préparés. On souhaite ainsi que leurs prochains projets accordent une place plus importante à l’économie circulaire, par exemple par une gestion écoresponsable des chantiers ou par la construction de bâtiments facilitant une éventuelle déconstruction.
Le Plan d’action 2024-2026 a été élaboré par un comité composé de représentants d’organisations (association sectorielle, ordre professionnel, syndicat et organisme public) couvrant toutes les étapes de la gestion des résidus de CRD. Ces acteurs sont les plus au fait des enjeux et défis qui auront à être relevés pour modifier les pratiques de gestion des résidus de CRD. Le gouvernement du Québec a d’ailleurs tout intérêt à prendre au sérieux ces propositions s’il souhaite mettre en place un cadre efficace permettant d’augmenter considérablement les taux et les avenues de valorisation des résidus de CRD.
- RECYC-QUÉBEC (2023). Bilan 2021 de la gestion des matières résiduelles au Québec, 73 pages.
- RECYC-QUÉBEC (2024). Actions prioritaires 2024-2026 : Secteur CRD (Construction, rénovation, démolition).
- RECYC-QUÉBEC (2024). Prévenir et mieux gérer les résidus de construction, de rénovation et de démolition.