ÉditosUne route accidentée sous le soleil 

Une route accidentée sous le soleil 

Par André Dumouchel

Ça y est, la modernisation de la collecte sélective est en marche depuis le 1er janvier. Nommé par le gouvernement du Québec comme organisme de gestion désigné (OGD) pour représenter l’ensemble des producteurs dans le cadre de la responsabilité élargie des producteurs (REP), Éco Entreprises Québec (ÉEQ) se préparait depuis plusieurs années à assurer cette transition et à en prendre pleinement les rênes.

Il faut d’abord souligner qu’ÉEQ, désormais responsable de la collecte sélective et de sonfinancement, a brillé dès janvier avec la mise en activité et l’inauguration d’un nouveau centre de tri à Montréal-Est. Construit selon ses spécifications techniques et exploité par Matrec, une division de GFL Environnement, ce centre figure parmi les plus modernes au Québec, voire au Canada. À lui seul, il pourra traiter, à terme, près de 25 % des matières recyclables du Québec. Impressionnant !

Ultramoderne, ce centre de tri est le seul au Québec à être équipé d’autant de trieurs optiques – 17 au total – et l’un des rares au Canada à utiliser des séparateurs à vis sans fin. Pour mener à bien ce projet d’envergure, l’expertise du manufacturier québécois Machinex, de Plessisville, a été mise à profit.

Construit en un temps record, ce nouveau centre de tri est le résultat du travail concerté d’une brochette de professionnels des plus compétents. Sara-Emmanuelle Dubois, directrice des opérations régionales à Matrec, en tête de file. Elle connaît les centres de tri comme le fond de sa poche, ayant roulé sa bosse dans l’industrie en se spécialisant dans l’analyse et l’amélioration de ces installations avant de se joindre à l’équipe de Matrec.

Après avoir visité le centre de tri de Montréal-Est en sa compagnie et bénéficié de ses explications, je n’ai aucun doute : une fois les équipements rodés et les ajustements apportés, la qualité du tri et des ballots de matières produits sera rehaussée. Si ce centre de tri incarne la modernisation de la collecte sélective, la facture pour y arriver sera élevée. Néanmoins, cela devrait favoriser une meilleure valorisation des matières et, du coup, contribuer à l’atteinte de l’un des objectifs fixés par le gouvernement du Québec avec la modernisation..

Oui, mais…

Impossible de passer sous silence la grogne des dernières semaines parmi les producteurs de matières, dont plusieurs transformateurs alimentaires. Ceux-ci dénoncent l’augmentation des coûts qu’ils doivent désormais absorber.

En vertu de la responsabilité élargie des producteurs (REP), sur laquelle s’appuie la modernisation, les producteurs sont responsables de la fin de vie des produits qu’ils mettent sur le marché. Depuis plusieurs années, ÉEQ savait qu’il avait de bonnes chances de devenir l’OGD chargé de la collecte sélective et s’y préparait. Ses membres en étaient conscients. Une fois son mandat officialisé, le gouvernement lui a remis un cahier des charges clair, précisant qu’il devait se préparer et informer ses membres qu’ils assumeraient, à terme, l’entièreté des coûts liés à leurs produits.

Les producteurs ont fort probablement reçu plusieurs communications d’ÉEQ à ce sujet. Pourtant, certains n’ont pas pris la pleine mesure des changements annoncés. Dans bien des cas, ce n’est qu’en consultant pour la première fois des documents envoyés depuis des mois, voire des années, qu’ils ont réellement pris conscience de l’ampleur des coûts et des implications financières du système modernisé.

Un autre facteur non négligeable s’ajoute : le gouvernement a revu les règles sur la consigne de certaines matières deux semaines avant de céder le volant à ÉEQ, lui laissant bien peu de temps pour s’adapter. Résultat : la consigne sur les bouteilles de vin et les cartons multicouches est reportée au printemps 2027. Ce seul report entraîne une augmentation supplémentaire du coût de collecte et de traitement d’environ 50 millions de dollars, puisque ces matières continueront d’être déposées dans le bac bleu d’ici là.

À l’évidence, la mise en œuvre de la modernisation de la collecte sélective représente un joli défi. Il est à souhaiter qu’Éco Entreprises Québec trouve des solutions pour atténuer la hausse des coûts pour les producteurs, tout en communiquant efficacement, autant auprès de ceux-ci qu’auprès de la population. Il en va de la réussite de cette transition. 

Le chemin vers cette modernisation ne sera pas de tout repos. La route sera longue, et nous en subirons les imperfections. Mais pour l’instant, savourons un instant de lumière : le soleil et ses rayons éblouissants qui éclairent le centre de tri de la rue Notre-Dame, à Montréal-Est. De l’optimisme, ça fait du bien ça fait du bien, et, comme diraient mes amis Bianca Bernard et Grégory Pratte, qui animent un balado sur l’environnement, Ça Va Mieux Qu’on Pense !

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